En matière de succession immobilière, il est primordial d’anticiper pour préserver ses héritiers d’importants frais. Loïc Parnière, conseiller en gestion de patrimoine, donne son point de vue et ses recommandations.

Propos recueillis par Louis Janmot

Aperçu d'enfants sur une table dans une maison inondée

Pense-t-on trop tard à la succession ? À quel moment faut-il commencer à s’y pencher ?

Depuis que je me suis lancé dans la gestion de patrimoine en 2007, j’ai vu des évolutions. Il y a quinze ans, on ne se souciait pas assez de la succession. Les médias ont contribué au fait que la nouvelle génération, notamment celle qui a moins de 50 ans, est de plus en plus sensible à la question. Et c’est bon signe, car il n’y a pas d’âge pour s’en soucier. À 20 ans, ça ne prend pas vraiment sens en apparence, mais c’est un âge où l’on peut se retrouver confronté à la première succession des grands-parents par exemple. Vient ensuite l’achat d’un premier bien, souvent comme résidence principale, et il faut impérativement en parler avec un notaire à défaut d’être accompagné par un conseiller en gestion de patrimoine (CGP). La prise de conscience évolue d’autant plus que les prix des biens ne sont plus du tout les mêmes qu’il y a 25 ans. Et, si le nécessaire n’a pas été fait, ce sont les enfants qui trinquent. Il faut savoir que certains héritiers se voient obligés de vendre le bien hérité, car ils n’ont pas les moyens de s’affranchir des droits de succession.

Quels sont les pièges à éviter en matière de succession immobilière ? Est-elle plus complexe qu’une succession constituée de sommes d’argent uniquement ?

Le problème, ce sont les pièces rapportées. Quand il n’y a pas eu de montage mis en place par un notaire ou conseiller patrimonial, on se retrouve sur une indivision. Or, nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision. Si, par exemple, j’hérite avec ma sœur, que rien n’a été fait et que je souhaite disposer seul du bien hérité, je vais devoir lui proposer de vendre sa part. Si nous ne trouvons pas un accord sur le prix, on vendra le bien et chacun récupérera sa part en numéraire. Mais attention, si le système est certes réglementé, le partage n’est pas nécessairement équitable car l’intégralité de l’héritage ne revient pas toujours à parts égales aux ayants-droits. Et il faut avoir en tête que l’on devra rapidement payer des droits de succession pour des biens situés dans des villes porteuses, et dans les dix grandes métropoles, car les valeurs y sont bien plus élevées que la moyenne.

Le conseil en patrimoine est donc primordial ?

Les gens se trompent souvent sur ce sujet. Ils se renseignent sur internet, car c’est gratuit, puis ils impriment des statuts de société civile et pensent que c’est bouclé, mais c’est faux. Il faut faire un diagnostic patrimonial, une analyse globale par un CGP, parfois gratuite, pour poser les bases. Il faut faire cette analyse également pour la famille, puis, dès qu’il y a des parents vivants avec un patrimoine important, ou des enfants issus d’un premier mariage, on fera des préconisations sur-mesure. Il ne faut pas non plus hésiter à se faire conseiller par un notaire car, il faut le rappeler, le conseil d’un notaire est gratuit, ce n’est que l’acte qui est payant.

Comment optimiser son patrimoine immobilier ?

Aujourd’hui, la résidence principale constitue généralement le premier achat, même si cet achat devient de plus en plus compliqué dans les grandes métropoles. Mais on ne gagne pas d’argent avec sa résidence principale, car on y paye absolument tout. On peut donc se tourner vers les revenus locatifs qui, même s’ils présentent quelques inconvénients, offrent de bonnes contreparties aussi avec des engagements de location, et des dispositifs comme le Malraux, sur l’ancien. On peut également acheter de l’ancien et le louer en meublé pour atteindre jusqu’à 100% de déduction fiscale avec le bon système d’amortissement.

Quels placements favoriser pour limiter les frais de succession ?

Le contrat d’assurance vie est le produit phare des Français et ce n’est pas pour rien. Il offre un abattement par enfant et permet de sortir de la succession. On peut aussi se tourner vers les donations mais, attention, l’abattement ne se renouvelle que tous les 15 ans. Il vaut donc mieux éviter de le faire trop tard, même si l’on a généralement de meilleures réserves à 65 ans qu’à 45 ans. On peut également créer une société civile, et aller voir un spécialiste. Un notaire, un CGP diplômé, ou un ingénieur patrimonial. Cela coûtera peut-être entre 2 000 et 3 000 euros, mais ce n’est pas grand-chose par rapport à ce que l’on peut économiser ensuite.

Quelle stratégie financière et fiscale adopter selon les profils ?

Il faut commencer par un rendez-vous de découverte patrimoniale pour définir le profil investisseur, connaitre les solutions à déterminer et viser des objectifs précis. Selon le tempérament de l’investisseur, on verra ce qu’il est possible de faire ou pas, car tout est très réglementé sur le volet financier. L’immobilier, en revanche, offre plus de latitudes car la réglementation est moins stricte. On se basera essentiellement selon la fiscalité et le reste à vivre. Il faut en effet un matelas de sécurité sur les livrets, car il faut se parer aux changements de locataires par exemple. La meilleure stratégie se construit à l’aide d’un professionnel, il est important de s’en entourer.

Quelle règle d’or faut-il suivre généralement en matière de succession ?

Régler le problème de la succession, c’est régler une tranquillité d’esprit pour les années à venir. Il vaut mieux en parler tranquillement autour d’une table quand tout va bien, avant que les soucis arrivent, pour éviter les cas complexes. Ça ne coûte rien de se faire conseiller et, à la fin, c’est toujours le client qui décide. Les professionnels ne forcent à rien.